Je me suis entretenu récemment avec Pierre Lafontaine, Directeur général de Ski de fond Canada depuis décembre dernier. Pierre n’est pas un nouveau venu en matière de sport. Avant son arrivée à SFC, il a dirigé Natation Canada.
Pierre, qu’est-ce qui t’a frappé à ton arrivée en poste à SFC?
Une des première différences que j’ai observée est qu’en ski de fond, le coach doit tout faire, surtout au niveau régional, et le coach doit être à la fois farteur, psychologue, masseur, chauffeur et gérant d’équipe. En natation, les clubs ont très souvent un gérant d’équipe, qui prend en charge toute la logistique (transport, hébergement, repas, etc.) lors des compétitions. Cela rend la tâche beaucoup plus compliquée pour le coach de ski de fond. C’est difficile de se concentrer sur le coaching quand tu dois assumer toutes ces responsabilités.
La seconde chose qui a été marquante, c’est d’avoir eu la chance de prendre une part active dans le Ski Tour Canada. Ces deux semaines durant lesquelles les meilleurs au Monde ont skié chez nous ont été complètement magiques. Nous en avons profité pour amener beaucoup de jeunes en piste et aussi, nous avons mis plusieurs de nos entraîneurs régionaux en contact avec le personnel, les athlètes et l’équipe technique de l’équipe nationale. Une opportunité incroyable de développement pour nos gens.
Quel bilan fais-tu de tes six premiers mois comme Directeur général de SFC?
Premièrement, j’ai observé que les infrastructures requises pour le ski de fond sont énormes, chaque équipe a besoin de beaucoup d’équipement et de beaucoup de personnel (fartage, testeurs, technique, etc.). Lorsque nous sommes en Europe, l’équipe canadienne a des camions pour transporter les équipement, les skis et le matériel de fartage.
Aussi, nos athlètes et toute l’équipe canadienne doivent vivre en mode “voyage” tout le temps, alors que les Européens sont chez eux. À la fin d’une compétition, la pluspart rentrent chez eux alors que nous, on doit s’arranger pour organiser notre vie dans nos bagages (lavage, etc.). Même quand nous sommes à l’étranger, les athlètes et l’équipe ont leur vie au Canada et leur vie de famille continue: chauffe-eau qui brise, enfants qui doivent faire leurs devoirs, etc. C’est un facteur important qui différencie la réalité de nos athlètes de celle des Européens.
Je tiens aussi à parler des équipes de soutien car eux aussi sont tout aussi impliqués que nos athlètes. Ce sont des passionnés de leur sport qui aiment gagner et qui sont affectés par les contre-performances de nos athlètes et emballés par leurs succès.
Comment ton expertise acquise avec la natation peut-elle servir au monde du ski de fond?
De plusieurs façons, je crois. Premièrement, les deux sont des sports individuels qui se pratiquent dans un contexte d’équipe (club). Par exemple, la majorité des entraînements sont collectifs, même si les épreuves, sauf les relais, sont individuelles. Dans ce contexte, l’athlète apprend des choses importantes de la vie avec ses coéquipiers: comment se fixer des objectifs, comment gagner, comment perdre aussi, et comment persévérer. Cela fait des athlètes de ces sports, une fois qu’ils sont sur le marché du travail, des employés de grande valeur.
Lorsque tu as été nommé, Jamie Coatsworth, président du Conseil d'administration de SFC, a affirmé “Nous comptons sur lui pour fournir la direction et l'orientation dont notre sport a besoin pour bâtir un programme gagnant qui saura aussi initier un plus grand nombre d'individus au ski de fond.” Quelles sont tes priorités pour SFC pour l’avenir?
Je veux d’abord m’assurer que nos athlètes ont ce dont ils ont besoin pour les grandes épreuves de 2018. Je veux aussi préparer nos athlètes, ceux qui ont 15 ans aujourd’hui, pour les jeux de 2022 et 2026. Une autre de mes priorités est de renforcer notre programme féminin, notamment au niveau du sprint.
Comment comptes-tu t’y prendre pour atteindre ces objectifs?
C’est très important pour le ski de fond canadien de renforcer ses entraîneurs car la force de notre mouvement doit passer par nos entraîneurs régionaux. Il faut également regrouper nos meilleurs athlètes plus souvent pour leur permettre de se mesurer entre eux et de se dépasser. En natation, les nageurs passent les jeudis, vendredis, samedis et dimanches ensemble très souvent.
Je veux que nous nous rapprochions des Américains en organisant des compétitions et des camps d’entraînement conjoints. Je compte aussi créer des rapprochements nord-sud avec eux dans l'est, et dans l'ouest du pays. Nous pouvons faire ça en nous rapprochant des programmes universitaires américains (NCAA), qui sont très solides.
J’aimerais aussi explorer la possibilité de créer une division “B” du circuit de la FIS. Les 100 meilleurs fondeurs au Monde concourent en Europe et les 100-200 pourraient concourir en Amérique du Nord. C’est à nous, en Amérique du Nord de nous prendre en main si nous voulons rivaliser avec et devenir les meilleurs.
Merci Pierre pour ta vision et bon succès!
Lire aussi cette entrevue que Pierre a accordée à Radio-Canada.